Bénéfice du doute

 

version texte

Règles régissant le preuve

39 Le Tribunal applique, à l'égard du demandeur ou de l'appelant, les règles suivantes en matière de preuve :

  1. il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci;
     
  2. il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l'occurrence;
     
  3. il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

 

L’article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) porte sur les règles régissant la preuve. Il est souvent appelé la clause du « bénéfice du doute ». Cela est dû au fait que, d’après l’article 39(c), le Tribunal doit trancher en faveur du demandeur ou de l’appelant, toute incertitude quant au bien-fondé de la demande. Ensembles, les règles de l’article 39 veillent à ce que les preuves à l’appui d’une demande soient interprétées de la manière la plus favorable. Les membres du Tribunal sont tenus d’appliquer ces règles aux faits et aux preuves de chaque cas.

Explication, en langage simple

Dans le cadre de son engagement à communiquer des décisions claires et rédigées en langage simple aux demandeurs, le Tribunal a une exigence clairement définie selon laquelle les membres du Tribunal doivent expliquer comment ils ont appliqué les dispositions de l'article 39, et ce, dans tous les cas. Le texte suivant vient de notre explication, en langage simple, qui apparaît dans toute décision :

Le comité a révisé tous les éléments de preuve qu'il avait en main et a pris en considération les arguments avancés par l'avocat. Ce faisant, le comité a respecté les dispositions de l'article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) […].

Cela signifie que le comité doit examiner les éléments de preuve sous le jour étant le plus favorable possible au demandeur/à l'appelant et trancher toute incertitude en sa faveur. La Cour fédérale a toutefois confirmé que cette Loi n'enlève pas au demandeur/à l'appelant son fardeau d'exposer les faits requis pour prouver que son affection est liée à son service. Le Tribunal n'est pas tenu d'accepter tous les éléments de preuve que lui présente un demandeur/appelant s'il les juge non crédibles, et ce, même s'ils ne sont pas contredits.1

1MacDonald c. Canada (Procureur général) 1999, 164 F.T.R. 42 aux paragraphes 22 & 29; Canada (Procureur général) c. Wannamaker 2007 CAF 126 aux paragraphes 5 & 6; Rioux c. Canada (Procureur général) 2008 CF 991 au paragraphe 32.

Décisions de la Cour fédérale

Un certain nombre de décisions de la Cour fédérale ont fourni au Tribunal concernant le bénéfice du doute :

Dans l’affaire MacDonald c. Canada (Procureur général) (1999) la Cour indique que « l'article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) […] ne veut pas dire que le Tribunal doit automatiquement accepter les prétentions d'un ancien combattant; il doit plutôt accepter la preuve si elle est vraisemblable et non contredite […] Il est mentionné dans la jurisprudence que le Tribunal doit accepter les éléments de preuve médicaux non contredits qui lui semblent vraisemblables dans les circonstances; toutefois, il peut rejeter ces éléments de preuve s'il est saisi d'une preuve contraire ou s'il fournit des motifs touchant la vraisemblance […] ».

Dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Wannamaker (2007) la Cour indique que « L’article 39 assure que la preuve au soutien de la demande de pension est examinée sous le jour lui étant le plus favorable possible. Toutefois, l’article 39 ne dispense le demandeur de la charge d’établir par prépondérance de la preuve les faits nécessaires pour ouvrir droit à une pension […] L’article 39 n’oblige pas non plus le Tribunal à admettre toute la preuve présentée par le demandeur. Le Tribunal n’a pas l’obligation d’accepter des éléments de preuve présentés par le demandeur s’il conclut qu’ils ne sont pas crédibles, et ce, même s’ils ne sont pas contredits. Par contre, il se peut que le Tribunal doive expliquer la raison pour laquelle il conclut que les éléments de preuve ne sont pas crédibles […] La preuve est crédible si elle est plausible, fiable et logiquement capable d’établir la preuve du fait en question ».

Dans l’affaire Rioux c. Canada (Procureur général) (2008) la Cour indique que «L’article 39 de la Loi, qui exige que le comité tranche en faveur du demandeur toute incertitude, ne dispense pas le demandeur de la charge d’établir par prépondérance de la preuve les faits nécessaires pour ouvrir droit à une pension […] ».

Dans l’affaire Schut c. Canada (Procureur général) (2003) la Cour indique que : « [l]e demandeur soutient que tout ce qu'il avait à faire en l'espèce c'était de soulever un doute [...]. Il ajoute que, cela fait, l'article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) requiert de trancher l'incertitude en sa faveur. La jurisprudence laisse toutefois entendre que les articles 3 et 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) ne libèrent pas le demandeur du fardeau qui est le sien de démontrer, par prépondérance des probabilités et en examinant la preuve sous l'angle le plus favorable possible, que son incapacité est liée au service. »

Dans l’affaire Tonner c. Canada (1995) la Cour indique que: « [l]a lecture de l'article 3 et du paragraphe 10(5) ne m'amène pas à interpréter les dispositions en question comme voulant dire que, quel que soit l'argument invoqué par un ancien combattant, cet argument doit automatiquement être accepté par les membres du TACRA. La preuve doit être vraisemblable ou digne de foi et elle doit être raisonnable. »

Dans l’affaire Irving c. Ministre des Pensions (1944), la Cour indique que: [Traduction] « Le doute doit bien entendu être raisonnable et ne pas être une acceptation contrainte ou fantaisiste de possibilités éloignées. »

Dans l’affaire King c. Procureur général du Canada (2001), la Cour indique que: « [l]'article 39 prévoit que le TAAC doit accepter tout élément de preuve non contredit, mais cela ne veut pas dire qu'il doit accepter tous les éléments de preuve. Si le TAAC est d'avis que la preuve n'est pas vraisemblable, cette preuve peut être rejetée [...]. »

Dans l’affaire Elliot c. Canada (Procureur général) (2003) la Cour indique que : « [p]our que la prescription enjoignait de tirer les conclusions les plus favorables possible ait un sens, elle doit s'appliquer dans les cas où une déduction ne serait pas tirée par prépondérance des probabilités. Une déduction raisonnable est donc celle qui n'est pas nécessairement probable mais qui est néanmoins davantage qu'une simple possibilité. »